Dans un Arrêt du 5 janvier 2021 n° 19-86.409, la Cour de cassation précise que le mineur qui a causé un accident de la circulation en conduisant sans permis un véhicule volé, dont le passager sort tétraplégique, engage la responsabilité de ses parents sur le fondement de la loi Badinter.
Les dispositions de l’article 3 de ladite loi (du 5 juillet 1985) sont d’ordre public. Les parents civilement responsables, couverts par une assurance de responsabilité civile, sont, en l’absence de faute inexcusable de la victime, solidairement responsables du dommage causé par leur enfant mineur.
Dans cette affaire, un mineur a été poursuivi devant le Tribunal pour Enfants des chefs de vol aggravé, blessures involontaires et défaut de permis de conduire pour avoir, le 4 mai 2010, conduit sans permis un véhicule volé avec lequel il a eu un accident de la circulation, à la suite duquel son passager et ami, a été gravement blessé et est devenu tétraplégique.
Les parents du conducteur et leur compagnie d’assurance ont été cités en qualité de civilement responsables de leur enfant mineur.
Par ailleurs, la compagnie d’assurance de la propriétaire de la voiture volée a également été mise en cause.
Le conducteur mineur a été déclaré coupable des délits précités par jugement devenu définitif.
Dans le cadre de la procédure sur intérêts civils, ayant pour objet d’indemniser les préjudices subis par le passager, le conducteur et ses parents ont été condamnés in solidum au paiement de différentes sommes à la victime et à la CPAM. Cette condamnation devait être garantie par la compagnie d’assurance des parents, civilement responsables.
Les parents et leur compagnie d’assurance ont contesté cette décision et se sont alors pourvus en cassation.
Parmi les différents moyens soulevés devant la Cour de cassation, les parents soutenaient notamment qu’ils n’étaient pas civilement responsables de leur enfant mineur sur le fondement des dispositions de la loi du 5 juillet 1985 relative aux accidents de la circulation mais uniquement sur celui de l’article 1384 alinéa 4, devenu 1242 alinéa 4 du Code civil, encadrant la responsabilité des parents du fait de leurs enfants.
Selon eux, ce régime de responsabilité du fait d’autrui permet d’opposer à la victime d’un dommage toute faute commise par cette dernière, même légère.
En l’espèce, en prenant place dans un véhicule qu’il savait conduit par son ami mineur et donc par une personne qui n’était pas titulaire du permis de conduire, le passager aurait commis une faute devant réduire son droit à indemnisation.
Toutefois, par arrêt en date du 5 janvier 2021, la Chambre criminelle de la Cour de cassation a rejeté l’argumentation développée par les parents et confirmé l’arrêt de la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE sur ce point.
Comme le rappelle la Cour de cassation, les dispositions de l’article 3 de la loi du 5 juillet 1985 sont d’ordre public et donc opposables aux parents civilement responsables d’un enfant mineur ayant conduit un véhicule sans permis.
Seule une faute inexcusable commise par le passager de la voiture aurait donc pu exclure sont droit à réparation en application des dispositions de la loi du 5 juillet 1985.
Une telle faute n’étant pas caractérisée en l’espèce, les parents civilement responsables, couverts par une assurance de responsabilité civile, doivent donc être déclarés solidairement responsables du dommage causé par leur enfant mineur, sous la garde desquels il se trouvait.
Les parents et leur assureur de responsabilité civile seront donc tenus d’indemniser intégralement les préjudices subis par la victime devenue tétraplégique s’élevant à plusieurs millions d’euros.
Maître Elisabeth HANOCQ, Avocat au Barreau d’AVIGNON, met ses compétences au service des victimes et familles de victimes, d’accidents de la circulation, de délits et de manière plus générale de toute atteinte à la personne ou aux biens.