Dans une affaire, le propriétaire d’un lot dans un lotissement a reproché au propriétaire d’un lot voisin (coloti) d’avoir construit en limite de propriété un ouvrage, en l’espèce un abri à usage d’appentis et de local à vélos, en violation des dispositions du cahier des charges du lotissement.
Le coloti a décidé d’assigner en justice son voisin à la fois pour réclamer la démolition de l’ouvrage réalisé, et une indemnisation au titre de son préjudice personnel (action en réparation).
La Cour de cassation a été appelée à se prononcer sur le délai de prescription applicable, pour l’une et l’autre de ces actions.
Par un arrêt rendu le 6 avril 2022, la Cour de cassation vient de fixer la double règle suivante, au visa des articles 2224 et 2227 du Code civil (cass. civ. 3ème 06.04.2022 n°21-13891).
- l’action en justice «tendant à obtenir la démolition d’une construction édifiée en violation d’une charge réelle grevant un lot au profit des autres lots en vertu d’une stipulation du cahier des charges d’un lotissement est une action réelle immobilière soumise à la prescription trentenaire»
- l’action en «réparation du préjudice personnel que prétend avoir subi le propriétaire d’un lot en raison de la violation des stipulations du cahier des charges est une action personnelle soumise à la prescription quinquennale».
Pour apprécier le point de départ du délai de 30 ans (action en démolition) et de 5 ans (action en réparation du préjudice personnel), il convient de prendre en compte la date à laquelle un propriétaire coloti a connu ou aurait dû connaître les faits permettant d’exercer son action (en principe, la date d’achèvement de la construction illicite).
En l’espèce, la Cour de cassation a censuré un arrêt de la Cour d’Appel de Paris, qui avait considéré que l’action en démolition d’une construction édifiée en infraction au cahier des charges d’un lotissement était une action personnelle se prescrivant par cinq ans (CA Paris 08.01.2021 RG 19/10197)
En revanche, la Cour de cassation a validé l’arrêt de la Cour d’appel de Paris, qui avait déclaré irrecevable, comme prescrite, l’action en indemnisation du préjudice personnellement subi par le coloti du fait de la violation par son voisin des stipulations du cahier des charges du lotissement.
Ainsi, l’action en démolition par un coloti d’un ouvrage construit par un autre coloti, en violation d’une charge réelle du cahier des charges d’un lotissement, est soumise à la prescription trentenaire. L’action en réparation au titre du préjudice personnel subi est, quant à elle, soumise à la prescription quinquennale.
Me Elisabeth HANOCQ – Avocat au Barreau d’AVIGNON – Cour d’appel de NIMES – Droit immobilier