L’envoi en possession d’un légataire universel : droits et obligations

Lorsqu’un testament désigne un légataire universel et qu’aucun héritier réservataire n’existe, le bénéficiaire du legs doit obligatoirement solliciter un envoi en possession pour faire reconnaître ses droits.

Une personne désignée comme légataire est présumée propriétaire des biens légués dès le jour de l’ouverture de la succession. Cependant, cette présomption ne produit ses effets que si la délivrance du legs est demandée dans les délais prévus par la loi.

Une affaire révélatrice

Dans une affaire récente, une femme décédée en juillet 2010 avait laissé un testament authentique daté de juin 2010. Ce testament instituait une personne comme légataire d’une partie de ses biens immobiliers, aux côtés de ses enfants, héritiers légaux.

Les héritiers ont contesté la décision de la cour d’appel, qui avait permis à la légataire de jouir des biens légués depuis le décès en juillet 2010, tout en rejetant leur demande de paiement d’une indemnité d’occupation à compter de cette même date.

La décision de la Cour de cassation

Par un arrêt du 21 juin 2023 (Cass. civ. 1ère, n°21-20.396), la Cour de cassation a censuré la décision de la cour d’appel. Bien que le légataire particulier devienne juridiquement propriétaire du bien dès l’ouverture de la succession, ce droit est conditionné à une demande de délivrance du legs (l’article 1014 du Code civil).

La Cour a précisé qu’il importe peu que le testateur ait remis le bien au légataire avant son décès. En l’absence de demande de délivrance, le légataire est privé de tout droit sur le bien.

Ainsi, la cour d’appel a commis une erreur en exemptant la légataire du paiement d’une indemnité d’occupation alors qu’elle n’avait pas respecté l’obligation légale de demander la délivrance du legs.

Les conséquences juridiques de l’omission de délivrance

Le non-respect des formalités relatives à la délivrance du legs peut entraîner des conséquences graves pour le légataire :

  • Perte des droits de propriété. Si la prescription est acquise, le légataire perd non seulement la propriété du bien légué, mais également les fruits produits par celui-ci (par exemple, les loyers ou autres revenus).
  • Obligation d’indemnisation. Faute d’avoir demandé la délivrance dans les délais, le légataire pourrait être tenu de verser une indemnité d’occupation aux héritiers légaux ou réservataires pour l’utilisation du bien.

Prescription et délivrance du legs

L’article 1014 du Code civil se combine à l’article 2219 du même code. Une fois la prescription acquise, le légataire perd irrémédiablement ses droits sur le bien.

Dans cette affaire, la Cour a également rappelé que les délais doivent être rigoureusement respectés. A défaut, les héritiers peuvent revendiquer les biens légués et en demander la restitution, même si le légataire en avait la jouissance depuis le décès du testateur.

En pratique : pourquoi faire appel à un avocat ?

Les successions impliquant des legs peuvent rapidement devenir complexes et conflictuelles. Un avocat spécialisé en droit des successions peut vous accompagner pour :

  • Rédiger et formaliser les demandes de délivrance de legs dans les délais légaux,
  • Contester ou défendre une jouissance anticipée d’un bien légué,
  • Prévenir les risques liés à la prescription et protéger vos droits.

Que vous soyez héritier ou légataire, un accompagnement juridique est essentiel pour vous accompagner dans le cadre d’une succession.

Maître Elisabeth HANOCQ – Avocat au Barreau d’AVIGNON – Cour d’appel de NIMES – Droit des successions

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